Pierre-Gilles de Gennes raconte…
Entretien avec Sydney Leach, 2005
Pierre-Gilles de Gennes est scientifique. Il a reçu le Prix Nobel de Physique en 1991 pour
ses travaux sur les cristaux liquides et les polymères. Il raconte son parcours
de scientifique lors d’un entretien ave Sydney Leach, lui-même scientifique de
renom, astrophysicien et Directeur de recherche Emérite du CNRS.
Un scientifique littéraire
Avant
de s’orienter vers les sciences, Pierre-Gilles de Gennes était également tenté
par les lettres ; cependant, très tôt il a eu « une méfiance » vis-à-vis
du milieu de l’art de son époque. Il évoque par exemple ces artistes qui «
jetaient un pot de peinture sur le mur et disaient qu’ils avaient créé une œuvre
d’art ». Cela le choquait et le choque toujours. Il oppose à cela les
disciplines scientifiques, où dit-il, il a « le pressentiment que
quand on fait quelque chose, on sait que c’est utile. On sait que c’est une brique
qui participe à un mur. On se sent beaucoup plus sûr de ce qu’on a fait. Par
contre les artistes ne sont pas sûrs d’eux.
En science, on ne prétend pas découvrir des choses géniales, mais on est
sûr qu’on apporte une contribution même modeste. »
« On devient curieux quand il se passe quelque
chose de bizarre ! »
Au
départ, raconte-t-il, il n’était pas doué pour « repérer le bizarre ».
C’est lors d’un stage dans un laboratoire de biologie qu’il en a « appris
plus sur l’observation que pendant des années de cours. C’est grâce à cette
expérience qu’[ il] a appris à tout observer avec un œil plus précis. »
Il raconte qu’à son époque, les scientifiques
se faisaient part de ce qu’ils avaient remarqué de « bizarre »
pendant leurs expérimentations, et que c’est grâce à cela qu’ils progressaient
dans leur recherche.
Ainsi, il
raconte qu’un jour il parlait avec un collègue et tout à coup, celui-ci lui
avait montré un résultat bizarre commentant « On voit pas d’où ça
sort ! ». Une fois rentré chez lui, Pierre-Gilles de Gennes avait relu
des publications sur cette recherche et avait essayé de comprendre le résultat bizarre
montré par son collègue. Il avait d’abord proposé des explications qui n’étaient
pas les bonnes et finalement, en avait trouvé une qui avait marché. « C’est
comme cela, explique-t-il, qu’on avance : on repère un élément bizarre. Et
on propose une autre expérience qui va finalement permettre d’y voir plus
clair.»
« Ça
c’est extraordinaire ! », s’enthousiasme-t-il.
« Nous sommes des générations gâtées »
« …Parce
que nos échanges sont très vastes. La communauté scientifique est devenue très
vaste aussi. C’est un grand bonheur quand les gens inventent quelque chose qui
les surprend. »
Pierre-Gilles de Gennes, évoque une autre anecdote illustrant la richesse de ces échanges
entre scientifiques.
Une fois, un collègue des
Etats-Unis lui avait envoyé un papier qu’il voulait soumettre à l’Académie
Américaine. Et Pierre-Gille de Gennes l’avait d’abord « jeté dans un
coin ». Puis il était retombé plus tard par hasard sur ce papier et il
avait compris l’expérience qui y était décrite. Son collègue avait une
plateforme sur laquelle il faisait vibrer les gouttes d’eau horizontalement. «La
curiosité intervient et elle double parce que celui qui avait fait l’expérience
n’a rien compris de ce qui se passait.» commente-t-il. C’est ainsi que Pierre-Gille
avait fini par trouver une explication assez simple.
La démarche scientifique
« L’intervention
initiale est la curiosité, quand on trouve quelque chose de bizarre. On essaie
de comprendre. Puis, on retourne vers les gens qui ont déjà expérimenté. Ensuite,
on propose une autre façon de travailler. Et finalement on arrive à sortir un
résultat ».
Moi, j’adore la physique et je rêve de devenir
astrophysicienne plus tard. Et donc ce scientifique m’a beaucoup inspirée. Il a
travaillé sur la matière complexe et les polymères. J’aimerais bien en savoir
plus.
Sruthi
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